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CATHERINE MORLAND
Jane Austen
CATHERINE MORLAND
Titre original,
Northanger Abbey
, 1818
La Revue blanche
, 1898, traduit par Félix Fénéon
Table des matières
I ...
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4
II ..
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9
III ...
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16
IV ....
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23
V ...
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27
VI ....
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31
VII ...
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38
VIII ....
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48
IX....
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57
X ...
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68
XI....
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81
XII ...
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92
XIII ...
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98
XIV ...
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108
XV....
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118
XVI ...
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129
XVII....
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139
XVIII ...
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143
XIX ...
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150
XX....
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156
XXI ...
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165
XXII....
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173
XXIII ...
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183
XXIV...
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190
XXV ....
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199
XXVI...
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208
XXVII ....
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216
XXVIII...
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221
XXIX ...
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231
XXX ....
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241
XXXI ...
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249
À propos de cette édition électronique ...
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253
– 3 –
I
Personne qui ait jamais vu Catherine Morland dans son en-
fance ne l’aurait supposée née pour être une héroïne. Sa situa-
tion dans le monde, le caractère de ses parents, sa propre per-
sonne et ses aptitudes, rien ne l’y prédestinait. Bien que clergy-
man, son père n’était ni méprisé ni misérable ; c’était un excel-
lent homme, bien qu’il s’appelât Richard et qu’il n’eût jamais été
beau. Il avait une fortune personnelle, outre deux bons bénéfi-
ces, et il ne prétendait pas le moins du monde tenir ses filles
sous clef. M
me
Morland était une femme de grand sens, de bon
caractère et, ce qui est plus remarquable, de bonne constitution.
Elle avait eu trois fils avant la naissance de Catherine ; et, au
lieu de trépasser en mettant celle-ci au monde, comme on devait
s’y attendre, – elle avait vécu encore, vécu pour avoir six enfants
de plus, pour les voir grandir autour d’elle, et pour jouir elle-
même d’une florissante santé. Une famille de dix enfants peut
toujours être dite une belle famille, quand il y a assez de têtes,
de bras et de jambes pour tous ; mais les Morland n’avaient
guère d’autre titre à cette épithète, car ils étaient en général fort
ordinaires, et Catherine, plusieurs années de sa vie, fut aussi
ordinaire qu’aucun d’eux. Elle était maigre et mal équarrie,
avait la peau blême, de noirs cheveux plats et de gros traits ;
non plus que sa personne, son esprit ne la marquait pour la
fonction d’héroïne. Elle raffolait de tous les jeux des garçons, et
préférait de beaucoup le cricket, non seulement aux poupées,
mais aux plus poétiques jeux de l’enfance, élever une marmotte
ou un canari, arroser un rosier. En effet, elle n’avait nul goût
pour les jardins, et, si elle cueillait des fleurs, c’était principale-
ment pour le plaisir de méfaire, du moins ainsi conjecturait-on,
à la voir toujours choisir celles qu’il lui était interdit de prendre.
Tels étaient ses goûts ; ses aptitudes étaient non moins extraor-
– 4 –
dinaires. Elle n’apprenait ou ne comprenait rien avant qu’on le
lui eût enseigné, – ni même après, quelquefois, car elle était
inattentive souvent et volontiers stupide. Sa mère avait consacré
trois mois à lui inculquer « la Prière du Mendiant », après quoi
Sally, sa sœur puînée, la récitait mieux qu’elle. Non que Cathe-
rine fût toujours stupide ; elle apprit la fable « le Lièvre et les
Amis » comme sans y penser, aussi vivement que fillette qui soit
en Angleterre. Sa mère désirait qu’on lui enseignât la musique,
et Catherine était persuadée qu’elle y prendrait goût, car elle
avait grand plaisir à faire sonner les touches de la vieille épi-
nette abandonnée. Elle commença à huit ans. Elle étudia une
année et ne voulut pas continuer. M
me
Morland, qui ne
s’obstinait pas à forcer le talent de ses filles, permit qu’elle en
restât là. Le jour où disparut le maître de musique fut de la vie
de Catherine l’un des plus heureux. Son goût pour le dessin était
médiocre ; toutefois, quand elle mettait la main sur quelque
morceau de papier, elle y figurait maisons et arbres, poules et
poussins ; elle ne parvenait pas, il est vrai, à différencier ces
images. L’écriture et le calcul lui étaient enseignés par son père ;
le français, par sa mère. Ses progrès en aucune de ces matières
n’étaient remarquables, et elle s’ingéniait à esquiver les leçons.
Quelle étrange, inconcevable nature ! car, avec tous ces affli-
geants symptômes, à dix ans elle n’avait ni mauvais cœur ni
mauvais caractère, était rarement entêtée, querelleuse presque
jamais, très gentille pour les petits, avec de rares moments de
tyrannie. Elle était d’ailleurs turbulente et farouche, détestait la
réclusion et le débarbouillage et n’aimait rien tant au monde
que rouler du haut en bas de la pente gazonnée, derrière la mai-
son.
Telle était Catherine Morland à dix ans. À quinze, les appa-
rences s’étaient améliorées ; elle commençait à se friser les che-
veux et rêvait d’aller au bal ; son teint prenait de l’éclat, ses
traits s’adoucissaient de rondeurs et de couleurs, ses yeux ga-
gnaient en animation et son personnage en importance ; comme
elle avait aimé se salir, elle aimait s’attifer ; elle avait mainte-
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